Les Thérapies EMDR de groupe: la force des vécus partagés face aux traumas.


Par Emmanuel Contamin, Psychiatre, pédopsychiatre, superviseur EMDR Europe, Membre de EMDR France, Françoise Contamin, Médecin, praticienne EMDR Europe et Laetitia de Schoutheete, Psychologue clinicienne, praticienne EMDR Europe.

Il y a des moments de l’histoire où les traumas se multiplient plus vite que les thérapeutes.
Des périodes où les catastrophes naturelles, les violences domestiques, les conflits armés, les exils forcés, les crises économiques et les pandémies laissent dans leur sillage des millions de corps tendus, de regards perdus, d’esprits fragmentés.

Les auteurs partent de ce constat lucide : le besoin d’accompagnement psychotraumatique est immense, mondial, et va encore augmenter !

Face à cette hausse vertigineuse, le soin individuel ne peut pas suffire.
Il faut des réponses collectives, humaines, ancrées dans le groupe.
C’est là que les thérapies EMDR de groupe trouvent toute leur pertinence.

Ces thérapies ne sont pas seulement une manière d’aider beaucoup de personnes en même temps.
Elles s’appuient sur quelque chose de plus ancien, de plus instinctif, de plus vital : la force du vécu partagé.

Lorsqu’une dizaine de personnes traumatisées se retrouvent ensemble, quelque chose se met en mouvement : un sentiment de ne plus être seul, un regard qui reconnaît, une émotion qui devient moins dangereuse parce qu’elle est traversée à plusieurs.

Le groupe va pouvoir offrir de la contenance, Il va pouvoir ainsi créer de la sécurité et génèrer une sorte de filet invisible où chacun se sait soutenu par les autres.

Dans certaines cultures, ce filet a un nom : la communauté émotionnelle.
C’est ce principe qu’a développé Adalberto Barreto dans les favelas du Brésil, et qu’on retrouve dans les pratiques communautaires rwandaises présentées par Simon Gasibirege.

Enfants et adolescents placés : quand le groupe devient alors un refuge.

L’article raconte une expérience bouleversante menée auprès de jeunes Colombiennes, toutes placées après avoir vécu des violences domestiques graves. Un pays marqué par cinquante ans de guerre civile. Une génération entière cabossée par l'insécurité, la peur, l’abandon.

Depuis 2008, Susana Roque-Lopez s’engage auprès d’elles, presque comme une mission.
Elle crée des séjours thérapeutiques structurés, fondés sur la cohérence cardiaque, la méditation, le yoga, l’hypnose, l’EMDR…
Et surtout sur le collectif.
...Et les résultats sont saisissants : les symptômes de stress post-traumatique diminuent nettement et durablement, même trois mois après le séjour.

Emmanuel Contamin, qui a participé à l’un de ces séjours, témoigne d’une scène magnifique : après une séance individuelle d’EMDR, une adolescente lui dit :

« Je me suis allongée dans l’herbe, j’ai regardé le ciel… les nuages partaient comme mes problèmes du passé.
Et je me suis dit : je suis une femme forte.
»


Dans ces groupes, le trauma ne s’efface pas, mais il se transforme, Il devient une matière partageable, soutenue, validée.

Ainsi ces jeunes filles repartent : avec une meilleure image d’elles-mêmes, une meilleure régulation émotionnelle, moins de troubles du comportement, plus de confiance, plus de motivation pour apprendre, plus de chances de construire un jour un couple et une parentalité apaisée.

C’est cela, la puissance d’un groupe qui soigne.

Les groupes EMDR pour réfugiés et personnes en grande précarité.

Les auteurs décrivent ensuite leur expérience à Lyon auprès de réfugiés, de personnes en réinsertion, de bénéficiaires du RSA, ou encore de personnes atteintes de cancer, toutes vivant des traumas multiples.

Alors, dans ces contextes, l’EMDR de groupe n’est pas un luxe. C’est parfois même la seule possibilité d’accéder à des soins psychiques.

Chaque cycle se déroule en 5 à 6 séances de deux heures.
La première permet : de faire connaissance, de rappeler les mécanismes du stress post-traumatique, d’évaluer les symptômes, de renforcer les ressources psychocorporelles.

Le soutien émotionnel est renforcé par les membres des associations, formés à accompagner les participants entre les séances.
On crée ainsi une mini-communauté thérapeutique, un tissu humain qui soutient le soin même en dehors du cabinet.

Les résultats sont impressionnants : une baisse moyenne de 19,3 à 11,7 sur l’échelle Sprint, une diminution subjective de 47 % des symptômes, une amélioration globale de 57 % par exemple.

Et cela chez des personnes vivant sous stress chronique, et traumas complexes parfois extrême.

Quand le dessin remplace les mots.

Le groupe offre une autre ressource essentielle : la possibilité de ne pas parler.
Dans ces protocoles, on utilise le dessin pour représenter le trauma. Cette méthode protège l’intimité et évite la reviviscence narrative. Elle transcende les barrières linguistiques.
Dans les contextes interculturels, c’est un avantage immense.
Le dessin transforme le trauma en forme, en couleur, en espace, il devient représentable, mais non dévoilé, montrable, mais pas envahissant.

EMDR en contexte de catastrophe : de l’urgence au soin structuré.

Historiquement, les thérapies EMDR de groupe ont été développées dans des contextes de catastrophes naturelles, où un petit nombre de praticiens devait aider une population entière.
Peu à peu, elles ont été utilisées : auprès de femmes victimes de viols de guerre en RDC, après des attentats, lors d’accidents majeurs.

Pourquoi cette diffusion si large ?
Parce qu’il existe une simplicité universelle dans ces groupes.
Et surtout, une acceptabilité interculturelle exceptionnelle.

On n’a pas besoin de raconter, on n’a pas besoin de se justifier, on n’a pas besoin de revivre, on a juste besoin d’être ensemble, de respirer ensemble, d’être contenus ensemble.

Et maintenant ? Vers une pyramide de soins à trois étages.

L’article se conclut par la réflexion essentielle qu'il faut repenser l’organisation du soin psychotraumatique.

Les auteurs imaginent une pyramide, adaptée des modèles de l’OMS :
Niveau 1 — Psychoéducation & auto-soins.
Avec une formation large de premiers secours psychologiques, de cohérence cardiaque, d'outils d’auto-thérapie.

Niveau 2 — TSR (Thérapie de Stabilisation et de Résilience).
Des groupes menés par des soignants formés mais pas forcément praticiens EMDR.

Niveau 3 — EMDR de groupe & EMDR individuel.
Pour les cas les plus sévères.

Cette vision permettrait d’élargir l’accès aux soins, tout en garantissant un accompagnement adapté aux niveaux de gravité.

En conclusion : le groupe comme source de guérison.

Ce que nous montre ce bel article, c’est que le groupe est plus qu’un dispositif pratique.
Il est : un contenant, un miroir, un refuge, une force, un lien, un accélérateur de résilience.

Lorsque les traumas sont trop lourds pour un seul thérapeute, lorsque les catastrophes se déchaînent, lorsque les services publics n’y arrivent plus, lorsque la solitude fait vaciller l’être humain… Le groupe peut devenir un espace où la guérison recommence.

Un espace où les nuages passent, où l’on se découvre fort, où l’on se retrouve ensemble, et où, parfois, on apprend à se dire :
« Je suis une femme forte.
Je suis un homme debout.
Nous sommes là. »


Bref, un article que nous vous conseillons de lire dans son intégralité... Cliquez sur ce lien...


- Formateur en Hypnose Médicale, Ericksonienne et EMDR - IMO au CHTIP Collège Hypnose Thérapies… En savoir plus sur cet auteur




Rédigé le 01/12/2025 à 15:26 | Lu 23 fois modifié le 01/12/2025